Série Les écoles du Cnam : épisode 9/11

Inetop : travail et orientation professionnelle

19 juillet 2023

95 ans : c’est l’âge du plus vieil institut du Cnam – l’Institut national d’étude du travail et d’orientation professionnelle (Inetop). Il a été fondé avant-guerre pour répondre à deux objectifs : jeter les bases d’un système d'orientation efficace pour les élèves terminant leur scolarité primaire et se destinant à l'apprentissage ; organiser de manière plus rationnelle et plus équitable la société en fondant le processus d'affectation sociale sur des méthodes psychotechniques.

Inetop 1L'Inetop, c’est tout à la fois !
Bien entendu, c’est d’abord et avant un institut où l’on forme à l’orientation professionnelle, à l’accompagnement ou encore à la psychologie du travail. Mais c’est aussi une équipe de recherche dont les membres sont affiliés au Centre de recherche sur le travail et le développement, un observatoire des politiques et des pratiques pour l'innovation en orientation, des activités d'expertise à la demande de grandes entreprises ou d'institutions publiques, ou encore une revue intitulée « L’orientation scolaire et professionnelle ».

Les missions de l’Inetop à la loupe

L’institut assure la formation des psychologues de l'Éducation nationale et propose un master en sciences humaines et sociales mention Psychologie, avec trois parcours disponibles : Psychologie de l'orientation et du conseil ; Travail, santé et parcours professionnels ; Conseil, orientation, bilan, insertion. On trouve également des actions de formation continue à l’Inetop, en direction des professionnels de l'orientation, de l'éducation et des ressources humaines, qui souhaitent approfondir leurs pratiques et actualiser leurs connaissances dans le domaine de l'orientation tout au long de la vie.

Par ailleurs, l’Inetop conduit des recherches fondamentales et appliquées en psychologie de l'orientation. Une grande partie des recherches est en relation avec les préoccupations des praticiens dans le champ de l'orientation scolaire et professionnelle et des transitions, là encore tout au long de la vie. Centre d'expertise et de ressources, l’Institut national d’étude du travail et d’orientation professionnelle répond aussi à des demandes d'interventions de conseil, d'études appliquées et d'expertises de la part d'organismes publics ou privés dans le domaine de l'orientation, de l'évaluation psychologique, de l'aide à la formation et aux personnes. Son champ d'action est international. L’Inetop est partenaire d’une chaire Unesco et d’un réseau UNITWin comprenant 21 universités partenaires, dans le champ de l’orientation vers un développement durable et un travail décent. Il est impliqué dans des projets européens et développe des formations de professionnels à l’international (récemment au Maroc, Irak et Tunisie).

L’Inetop assure également la diffusion des connaissances scientifiques et la documentation sur les pratiques, méthodes et recherches en orientation en s'appuyant sur des fonds de ressources documentaires (30 000 livres de référence) et sur le centre de ressources Thierry Boy, rassemblant depuis sa création des outils et méthodes en orientation. Il édite enfin une revue scientifique à comité de lecture international, « L’orientation scolaire et professionnelle », diffusée sous format papier et en ligne sur le portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales de OpenEdition Journals.

3 QUESTIONS À VALÉRIE COHEN-SCALI, PROFESSEURE DE PSYCHOLOGIE DE L’ORIENTATION, DIRECTRICE DE L’INETOP

Valérie Cohen-ScaliPrès de 100 ans d’existence : l’Inetop incarne-t-il un ancrage aussi essentiel qu’à ses débuts dans son domaine d’expertise ?

Actuellement, et malgré le développement des formations et de la recherche en orientation par diverses institutions, l’Inetop demeure un centre de référence en France pour son expertise unique dans le domaine de la construction d’outils, de dispositifs et de méthodes en orientation et de leur évaluation. Mais, au cours des quinze dernières années, l’Inetop est également devenu un espace d’innovation en matière de recherche et de pratiques d’orientation. Ses chercheurs ont récemment développé des modèles théoriques qui ont impulsé de nouveaux paradigmes dans le domaine de l’orientation. À l’international, l’Inetop est très connu et régulièrement sollicité pour des expertises, des formations et des travaux de recherche. L'Inetop fait partie d’un réseau Unesco pour le développement de la recherche et d’interventions centrées sur les approches de « conception de la vie » et ses écosystèmes. Actuellement, les chercheurs se mobilisent également sur un pan de l’orientation peu développé qui concerne les publics les plus vulnérables, auxquels les méthodes traditionnelles    ne sont pas nécessairement adaptées.

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Vous formez des conseillers en orientation, des psychologues du travail : en quoi ces métiers sont-ils importants ?

Les conseillers en orientation interviennent dans des champs très variés. Ils aident à l’orientation des élèves (pour les psychologues de l’Éducation nationale) et des jeunes en général, et leur permettent d’éclairer leurs connaissances des filières de formation, du monde du travail et d’eux-mêmes. Actuellement, l’orientation des élèves est principalement confiée aux enseignants. Aussi, les psychologues de l’Éducation nationale ont un rôle dans l’accompagnement des enseignants dans cette mission complexe. Les psychologues de l’orientation et du travail interviennent également dans des associations, des cabinets de consultants ou des structures spécialisées dans l’accompagnement des personnes, pour les aider dans la construction de leur parcours de vie. Ils peuvent intervenir dans les entreprises (RH) où ils travaillent sur l’accompagnement au développement professionnel, à la reconversion professionnelle des salariés, mais également sur les questions de qualité de vie dans les organisations. Ils peuvent aussi intervenir dans les situations de changement en permettant d’identifier des difficultés individuelles et collectives. Ces professionnels sont également des connecteurs, car ils peuvent travailler avec des personnes aux profils variés (comme des spécialistes de la formation, des RH, de la santé). Ils sont formés à l’Inetop et y acquièrent une approche systémique des situations des personnes et des entreprises. Ces métiers sont très importants dans le contexte actuel de multiplication/diversification des formes de vulnérabilités pour aider chacun à construire sa vie et pour penser son rôle dans une société confrontée à des crises.

De quoi le monde du travail aurait-il besoin aujourd’hui pour assurer le bien-être des personnels ?

Pour les individus au travail, ce qui compte le plus est d’avoir un travail qui a du sens et qui permette de vivre décemment, avec une rémunération juste et des conditions de travail qui préservent leur santé physique et mentale. Or, plusieurs enquêtes (notamment de la Dares) montrent que c’est un sentiment de moins en moins partagé. Un nombre de salariés croissant ont le sentiment que leur travail est nuisible pour l’environnement et pour les générations futures. Ils ont perdu confiance dans l’entreprise, qu’ils perçoivent comme une machine qui les exploite et les utilise pour autre chose que pour améliorer la société. Il est possible que certaines structures soient plus respectueuses de l’autonomie et de la parole des salariés, et développent ainsi des produits et des services selon des modalités plus participatives. C’est le cas des structures de l’économie sociale et solidaire (ESS). D’autres entreprises essaient de s’inscrire dans des cadres internationaux. Par exemple, certaines rejoignent le Pacte mondial des Nations unies, qui est un appel aux entreprises du monde entier à aligner leurs pratiques et leurs stratégies sur des principes qui découlent des textes fondamentaux des Nations unies, dans les domaines des droits humains, du droit du travail, de l’environnement et de la lutte contre la corruption. L’ambition de ce pacte est que les entreprises respectent certains principes et contribuent aux objectifs de développement durable. Cela implique des changements dans les formes de production et de gouvernance et la construction d’écosystèmes qui favorisent les progrès vers une société plus responsable. Les psychologues constituent des observateurs et des analystes des problèmes de qualité de vie au travail ; ils sont également des leviers et des accompagnateurs pour mettre en place des changements de fonctionnement et de pratiques dans les entreprises. Dans nos masters de psychologie du travail et de l’orientation, nous donnons une place aux questions de santé et de bien-être au travail, aux équilibres entre les sphères de vie (privée et professionnelle), à la transition climatique et aux conditions qui doivent être réunies pour contribuer au travail décent.